Madame de La Fayette

 


 

Madame de La Fayette

 

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Madame de La Fayette

 

Présentation

 

 

Madame de La Fayette est un auteur du XVIIe siècle, qui a marqué son époque pour de nombreuses raisons. Elle entreprend son activité d’écrivain durant la période mondaine où elle réside à Paris. C’est une femme noble qui a eu, pendant sa jeunesse, une solide instruction et qui a été toujours attirée par la culture humaniste et l’écriture comme, son amie Mme de Sévigné. Pourtant, elle ne veut pas être considérée comme une femme savante ; elle cherche plutôt à analyser en profondeur le sujet choisi par ses réflexions. Elle est donc une femme d’esprit. Ses oeuvres sont historiques. En effet, les trois romans les plus importants que cette femme a écrits, se déroulent à la cour de France, au XVIe siècle. Ce sont : La princesse de Montpensier, La princesse de Clèves et La comtesse de Tende.

Dans ces trois œuvres, outre le thème historique qui est toujours présent et qu’on vous  présente avec un extrait de La princesse de Montpensier, on trouve aussi la conception pessimiste de l’amour. C’est surtout dans La princesse de Clèves qu’on décrit ce sentiment qui provoque la mort de ceux qui l’éprouvent.
Même si, dans ses oeuvres, les aspects historiques sont importants, le thème dominant est l’amour. Au contraire de la merveilleuse idée qu’habituellement on a de l’amour, celui-ci est présenté comme un sentiment qui ne conduira jamais au bonheur et qui détruira les âmes qu’il envahit.

 


Cadre historique des oeuvres de Mme de La Fayette

 

Marie-Madeleine Pioche de la Verge naît à Paris en 1634. Tout au long de sa vie, elle fera partie de ce groupe de femmes nobles (Madeleine de Scudéry, Madame de Sévigné) intéressées par la culture et l’écriture. Tout en étant femme, elle a la chance de bénéficier d’une bonne instruction, garantie par son maître, Ménage, un célèbre grammairien.
En 1655 elle se marie avec le comte de La Fayette, duquel elle acquiert le nom. Elle a vingt ans, il en a trente-neuf. Dans les premières années de mariage, elle suit son époux toujours occupé par de nombreux procès mais, ennuyée par cette vie, en 1661 elle décide de résider à Paris, où elle mène une vie mondaine et fréquente l’Hôtel de Rambouillet. Elle devient intime de Mme de Sévigné et surtout du célèbre écrivain La Rochefoucauld.
Durant cette période de vie mondaine, elle commence son activité d’écrivain. Ses œuvres se réfèrent à des époques historiques précises . Son premier texte, publié en 1662, "La Princesse de Montpensier", se déroule sous le règne de Charles IX, pendant la seconde partie du XVI siècle, pendant les guerres de religion (1570). Il s’agit d’une nouvelle: Mme de Lafayette choisit donc la brièveté, ce qui ne l’empêche pas de combiner harmonieusement narrations, portraits, descriptions, dialogues et analyses psychologiques. Le thème de l’amour fatal est déjà présent et il est inséré dans un cadre spatio-temporel historique. Parfois l’auteur choisit des personnages historiques ayant réellement vécu et modifie leur vie, surtout leurs sentiments en les adaptant à la trame de son oeuvre. Les personnages principaux de ce texte, l’épouse du jaloux Comte de Montpensier, et le duc de Guise (Henri, principal artisan du massacre de la St-Barthélemy, chef de file du parti catholique intransigeant jusqu’à son assassinat par la garde d’Henri III) s’aiment éperdument. La ravissante beauté de la jeune fille fait aussi tomber amoureux d’elle son confident, le comte de Chabanes, conseiller et ami du Comte de Montpensier, ainsi que le frère du roi, le duc d’Anjou (Henri, lui aussi est un des principaux organisateurs du massacre du 24 août 1572; il fut roi de Pologne et ensuite de France sous le nom de Henri III). La nouvelle s’achève dans le drame: Chabanes périt dans la guerre civile, le Comte de Montpensier découvre la vérité et le duc de Guise décide donc de quitter la princesse, qui meurt de douleur.
On a choisi un extrait pour vous montrer comment l’auteur insère cette oeuvre dans un cadre historique, et utilise comme personnages des hommes ayant réellement vécu en adaptant leur vie à la nouvelle:

"Les armées étant remises sur pied, tous les princes y retournèrent; et le prince de Montpensier trouva bon que sa femme s’en vînt à Paris, pour n’être plus si proche des lieux où il faisait la guerre. Les huguenots assiégèrent la ville de Poitiers. Le duc de Guise s’y jeta pour la défendre et il y fit des actions qui suffiraient seules pour rendre glorieuse une autre vie que la sienne. Ensuite la bataille de Moncontour se donna. Le duc d’Anjou, après avoir pris Saint-Jean-d’Angély, tomba malade, et quitta en même temps l’armée, soit par la violence de son mal soit par l’envie qu’il avait de revenir goûter le repos et les douceurs de Paris, où la princesse de Montpensier n’était pas la moindre des raisons qui l’attirât. (…) Le duc d’Anjou ne changea pas à Paris les sentiments qu’il avait conçus pour elle à Champigny."
(La Princesse de Montpensier du recueil "Roman et Nouvelles" Classiques Garnier)

En réalité la scène n’est qu’un monde historique fictif car les faits historiques sont perturbés par la place prépondérante du thème de l’amour. En outre, sous ces adaptations l’auteur cache des allusions à son époque contemporaine.   
Toutes ses oeuvres, sauf Zaïde (1670) qui se déroule dans l’Espagne médiévale, se situent à la Cour de France au XVIe siècle. Son chef d’œuvre, La Princesse de Clèves, se déroule juste avant les terribles guerres de religion, à la fin du royaume d’Henri II, époux de Catherine de Médicis et père de Charles IX et de Marguerite de Navarre, dont le roman raconte comme toile de fond la mort. De même, son dernier succès La Comtesse de Tende est situé au début de la seconde partie du XVIe siècle (1560), quand Catherine de Médicis est nommée régente du royaume hérité par son fils, Charles IX, au jeune âge de dix ans, peu avant les premières émeutes entre protestants et catholiques. 
Mme de La Fayette écrit aussi deux ouvrages historiques, les Mémoires de la Cour de France pour les années 1688 et 1689 qui paraîtront en 1731 et L’Histoire d’Henriette d’Angleterre qui sera publiée en 1720.Mme de La Fayette était intime d’Henriette d’Angleterre. Celle-ci était  fille de Charles I d’Angleterre et d’Henriette de France, et femme du duc d’Orléans, frère de Louis XIV. C’était une jeune femme comblée, belle et spirituelle, raffinée, protectrice des arts, habile diplomate qui introduisit Mme de La Fayette à la Cour. Cette femme mourut prématurément, à l’âge de vingt-six ans, en 1693.

 

 

La Princesse de Clèves
Cette oeuvre est brève, d’une conception relativement simple. La narration se base essentiellement sur trois personnages principaux : Mademoiselle de Chartres, après s’être mariée avec le prince de Clèves, même si elle ne l’aime pas, tombe amoureuse du duc de Nemours, redoutable séducteur, qui l’aime aussi. Elle cherche à résister à sa passion; toutefois son mari pense qu’elle a une liaison avec le duc et ravagé par la jalousie, il tombe malade.
La princesse de Clèves dit à son mari que rien ne s’est passé entre elle et le duc ; et le prince la croit, mais déjà très malade il meurt. Le duc pense que finalement il lui sera possible de se marier avec la comtesse, mais elle le tient pour responsable de la mort de son mari. Désespérée, la jeune femme se retire du monde et meurt peu après.
Le thème central de cette oeuvre est celui de l’amour qui se développe à la cour, au milieu d’intrigues sentimentales et politiques. Dans ce lieu, tous les princes et les grands seigneurs sont galants, bien faits et amoureux. Cette cour, où règnent la magnificence et la galanterie, est toute peuplée de "belles personnes". La princesse de Clèves est la plus belle femme de la cour ; elle est blonde, son teint est d’un blanc admirable, son visage et sa personne sont pleins de grâce et de charme. La beauté fait naître l’amour entre Mme de Clèves et M de Nemours, qui tombent amoureux l’un de l’autre grâce à leur beauté réciproque :la première fois qu’ils se voient ils sont tous les deux victimes d’un coup de foudre. Cette passion réciproque ne sera jamais avouée. C’est parce que, dans ce monde, à moins de se déshonorer, une femme n’avouait jamais son amour. L’homme, de son côté, ne se permettait de lui parler de sa passion qu’après une très longue attente, car il savait que sa déclaration pouvait être considérée comme une sorte d’injure. C’est cela qui explique pourquoi M. de Nemours met beaucoup de temps avant de déclarer son amour et pourquoi Mme de Clèves ne lui avoue sa passion que lorsque tout est dit et qu’elle est décidée à ne plus le revoir. Elle ne veut pas lui démontrer son amour parce qu’elle est mariée et elle éprouve de la honte à aimer M. de Nemours. Dans ce roman  l’amour est dominé par la jalousie qui apparaît, non pas comme une maladie, mais comme la manifestation la plus profonde de l’amour même.
On vous présente un extrait concernant ce thème. Mme de Clèves trouve la lettre d’une femme, qu’elle pense être adressée à M. de Nemours.  Mme de Clèves soupçonne alors le duc d’aimer une autre femme...

 

 

 

Mme de Clèves lut cette lettre et la relut plusieurs fois, sans savoir néanmoins ce qu’elle avait lu. Elle voyait seulement que M de Nemours ne l’aimait pas comme elle l’avait pensé et qu’il en aimait d’autres qu’il trompait comme elle. Quelle vue et quelle connaissance pour une personne de son humeur, qui avait une passion violente, qui venait d’en donner des marques à un homme qu’elle en jugeait indigne et à un autre qu’elle maltraitait pour l’amour de lui ! Jamais affliction n’a été si piquante et si vive:il lui semblait que ce qui faisait l’aigreur de cette affliction était ce qui s’était passé dans cette journée et que, si M de Nemours n’eût point eu lieu de croire qu’elle l’aimait, elle ne se fût pas souciée qu’il en eût aimé une autre. Mais elle se trompait elle-même ; et ce mal, qu’elle trouvait si insupportable, était la jalousie avec toutes les horreurs dont elle peut être accompagnée. Elle voyait par cette lettre que M de Nemours avait une galanterie depuis longtemps. Elle trouvait que celle qui avait écrit la lettre avait de l’esprit et du mérite ;elle lui paraissait digne d’être aimée ;elle lui trouvait plus de courage qu’elle ne s’en trouvait à elle-même et elle enviait la force qu’elle avait eue de cacher ses sentiments à M de Nemours. Elle voyait, par la fin de la lettre, que cette personne se croyait aimée ; elle pensait que la discrétion que ce prince lui avait fait paraître, et dont elle avait été si touchée, n’était peut-être que l’effet de la passion qu’il avait pour cette autre personne à qui il craignait de déplaire. Enfin elle pensait tout ce qui pouvait augmenter son affliction et son désespoir.

Cet épisode est important parce que c’est par l’expérience de la jalousie que Mme de Clèves découvre la vraie signification de l’amour. Mais la jalousie, comme nous le voyons dans l’extrait, est faite de soupçons, de pensées cruelles et inutiles qui mènent à un amour inséparable de l’inquiétude et de l’angoisse.
Dans tous ses romans, Mme de La Fayette utilise le thème de l’amour contrarié et source de souffrance.
Mme de La Fayette, en quittant ce monde, le 25 mai 1693, laissa de nombreux manuscrits, parmi lesquels La comtesse de Tende. On ne sait rien de cette nouvelle, sinon qu’elle parut dans le Mercure de France de juin 1724. On en a dit, fort justement, qu’elle pouvait être une première forme de La princesse de Clèves dont elle présente, en effet, un bref résumé.
La comtesse de Tende est l’histoire d’une femme aimante et vertueuse qui, ulcérée par les trahisons de son mari, le comte de Tende, se venge de lui et s’en trouve cruellement punie.
Au début du récit, elle est chargée par son mari d’aider le jeune et beau chevalier de Navarre à conquérir la charmante princesse de Neufchâtel, veuve et héritière d’une souveraineté l’ayant rendue le parti de la cour le plus élevé et le plus brillant. Des fréquentations entre la comtesse de Tende et ce jeune homme naît un amour violent et passionnel, qui bouleverse et entrave la réussite du dessein préfixé. (L’extrait qui est peut-être le plus significatif, puisqu’il concerne la naissance de cette passion, est le suivant: “Le chevalier de Navarre la vint voir, il prit des liaisons et des mesures avec elle; mais en la voyant, il prit aussi pour elle une passion violente. Il ne s’y abandonna pas d’abord; il résista; mais pour résister, il ne fallait pas voir souvent la comtesse de Tende et il la voyait tous les jours en cherchant la princesse de Neufchâtel; ainsi il devint éperdument amoureux de la comtesse. Il ne put lui cacher entièrement sa passion; elle s’en aperçut; son amour propre en fut flatté et elle se sentit un amour violent pour lui.”)
Tout de même, le mariage entre le chevalier et la princesse est célébré. C’est à ce moment que le chagrin s’empare des deux amants qui ne trouveront la paix que dans la mort, dans laquelle ils seront enfin réunis. En effet, après la nouvelle de la disparition prématurée du chevalier de Navarre, de qui elle attend un enfant, la comtesse de Tende sombre dans le plus noir désespoir, état qui ne prendra fin qu’avec sa mort. (“Elle passa quelque temps en cet état, paraissant plutôt une personne morte qu’une personne vivante. Enfin, vers le sixième mois de sa grossesse, son corps succomba, la fièvre continue lui prit et elle accoucha par la violence de son mal. Elle eut la consolation de voir son enfant en vie, d’être assurée qu’il ne pouvait vivre et qu’elle ne donnait pas un héritier illégitime à son mari. Elle expira elle-même peu de jours après et reçut la mort avec une joie que personne n’a jamais ressentie; elle chargea son confesseur d’aller porter à son mari la nouvelle de sa mort, de lui demander pardon de sa part et de le supplier d’oublier sa mémoire, qui ne lui pouvait être qu’odieuse.”).
Dans ce dernier roman de Mme de La Fayette ressort avec plus de force le troisième thème: la mort. Ce sujet est d’ailleurs constamment présent, même dans La princesse de Montpensier et dans La princesse de Clèves.
C’est le terme vers lequel chacune des héroïnes est mystérieusement entraînée malgré elle. Dans cette lutte désespérée, l’âme à la fin s’épuise, et le dernier choc en a raison. Mort et amour vont paradoxalement de pair chez Mme de La Fayette. Alors que l’amour est vie, joie, triomphe, l’auteur l’associe inexplicablement aux angoisses, au désastre, à la mort. Il faut admettre que nos héroïnes portent en leur âme leur propre poison et qu’elles sont trop délicates pour ne pas être déchirées par leur “faute”. Le combat acharné qu’elles doivent mener contre la passion fait éclore en elles ce germe de déséquilibre et de destruction. Qu’elles triomphent de la passion ou qu’elles y cèdent, elles en meurent également.


Jugements Critiques

 

La personnalité de Mme de La Fayette n’est pas très bien connue. La romancière n’a pas laissé de mémoires ni d’autobiographie et sa correspondance est avare de confidences. Cette extrême discrétion constituait la norme au XVIIe siècle. De plus la romancière appartient à la plus haute société : une grande dame ne peut s’abandonner aux confidences, ni se reconnaître écrivain. C’est pourquoi ses œuvres sont publiées sans nom d’auteur ou sous nom d’emprunt. Par exemple, La Princesse de Clèves est publié en 1678 sous l’anonymat ; mais bien vite, les contemporains y voient l’œuvre conjointe de La Rochefoucauld et de Mme de La Fayette. Longtemps, celle-ci récuse toute participation. Elle écrit au chevalier de Lescheraine le 13 avril 1678 :
"Un petit livre qui a couru il y a quinze ans (La princesse de Montpensier N.D.R.) et où il plut au public de me donner part, a fait qu’on m’en donne encore à La Princesse de Clèves. Mais je vous assure que je n’y en ai aucune et que M. de La Rochefoucauld, à qui on l’a voulu donner aussi, y en a aussi peu que moi ; il en fait tant de serments qu’il est impossible de ne le pas croire, surtout pour une chose qui peut être avouée sans honte. Pour moi, je suis flattée qu’on me soupçonne d’avoir écrit La princesse de Clèves et je crois que j’avouerais le livre, si j’était assurée que l’auteur ne vînt jamais me le redemander. Je le trouve très agréable, bien écrit sans être extrêmement châtié, plein de choses d’une délicatesse admirable et qu’il faut même relire plus d’une fois. Et surtout, ce que j’y trouve, c’est une parfaite imitation du monde de la cour et de la manière dont on y vit. Il n’y a rien de romanesque et de grimpé ; aussi n’est-ce pas un roman : c’est proprement des mémoires et c’était, à ce que l’on m’a dit, le titre du livre, mais on l’a changé.".

 

Comment expliquer le comportement de Mme de La Fayette ?
-La raison majeure semble d’ordre social : une grande dame ne peut s’avouer l’auteur d’un roman sous peine de déchoir.
-On pourrait penser aussi que, romancière clandestine, Mme de La Fayette a voulu goûter les charmes de l’incognito, a pris plaisir à un malicieux dédoublement de personnalité.
-il se peut aussi qu’elle se soit inspirée de situations réelles observées dans la plus haute société, peut-être même dans la famille royale, et dont elle voulait garder le secret. L’anonymat de la publication rendait encore plus malaisée l’identification des protagonistes...

 

Comment La Princesse de Clèves a-t-elle été considérée à travers les siècles ?
Déjà à l’époque de Mme de Lafayette, ses textes étaient très appréciés et reconnus comme de vrais chefs-d’œuvre. Un exemple éclairant peut être celui de Fontenelle, qui écrit en 1678 :
"Il vous serait aisé de juger qu’un géomètre comme moi, l’esprit tout rempli de mesures et de proportions, ne quitte point son Euclide pour lire quatre fois une nouvelle galante, à moins qu’elle n’ait des charmes assez forts pour se faire sentir à des mathématiciens mêmes, qui sont peut-être les gens du monde sur lesquels ces sortes de beautés trop fines et trop délicates font le moins d’effet.".
Jusqu’à la Révolution, La Princesse de Clèves, rééditée plus de vingt fois, connaît une faveur qui ne se dément pas. Ce qu’on apprécie, c’est son "naturel", sa "délicatesse". 
Voltaire (XVIIIe siècle) admire beaucoup les romans de Mme de Lafayette et la décrit non sans louange : "La Princesse de Clèves et Zaïde furent les premiers romans où l’on vit les mœurs des honnêtes gens et des aventures naturelles décrites avec grâce".
Rousseau (XVIIIe siècle) non plus ne reste pas impassible à la beauté des œuvres de Mme de La Fayette et lorsqu’il écrit Julie, il croit refaire La Princesse de Clèves : "Il faut une delicatesse de tact qui ne s’acquiert que dans l’éducation du grand monde pour sentir, si j’ose dire, la finesse de cœur dont cet ouvrage est rempli... Je mets sans crainte la quatrième partie de "La nouvelle Héloïse" à côté de La Princesse de Clèves.".
Au XIXe siècle Stendhal définit La Princesse de Clèves comme un livre délicat. Son admiration s’adresse à son écriture qu’il définit à la fois comme parfaite (La Princesse de Clèves est pour lui "le premier des romans en date, et le premier presque en mérite") et comme démodée. Le roman de Mme de La Fayette transmis de génération en génération, comme un objet d’art précieux et démodé, survit au cours des siècles. Jeune fille mélancolique et bourrée de préjugés d’un autre âge, La Princesse de Clèves séduit les esprits. C’est parce qu’elle est démodée qu’elle est précieuse et qu’on l’aime. Cinq éditions s’étaient succédé au cours de la première moitié du siècle. De 1850 à 1900 il en paraît quatorze. Les critiques officiels parlent de Mme de La Fayette de façon admirative. Sainte-Beuve dépeint Mme de La Fayette sous les traits d’une femme extrêmement sensible "pleine de langueur", "douce et résignée" ; il considère la Princesse de Clèves comme "le premier en date des plus aimables romans". Il aime la modération des peintures, la discrétion du style et sa couleur "un peu passée". Barbey d’Aurevilly s’extasie sur l’adorable simplicité de l’œuvre de Mme de La Fayette et vante ses "nuances tendres et choisies". Taine écrit : "Ce style et ces sentiments sont si éloignés des nôtres que nous pouvons à peine les comprendre ; ils sont comme des parfums trop fins ; nous ne les sentons plus. Tant de délicatesse nous semble de la froideur ou de la fadeur. La société transformée a transformé l’âme. L’homme, comme toute chose vivante, change avec l’air qui le nourrit". Ainsi l’amer et violent réquisitoire que Mme de La Fayette avait dressé contre l’amour est devenu, deux siècles plus tard, un pastel aux couleurs défraîchies.
Au XXe siècle, on s’intéresse de nouveau à Mme de La Fayette  pour l’analyse qu’elle fait de la passion amoureuse et pour sa particulière conception de l’amour. Par exemple, Albert Camus publie en 1943 un article dans la revue "Confluences" où il étudie ce qu’il définit "une extraordinaire théorie du mariage considéré comme un moindre mal : il vaut mieux être fâcheusement mariée que de souffrir de la passion." Camus fait une analyse psychologique de la conception de l’amour tel qu’il ressort des œuvres de Mme de La Fayette : " Mme de La Fayette a mis en balance l’injustice d’une condition malheureuse et le désordre des passions ; (...) par un mouvement étonnant de pessimisme, elle a choisi l’injustice qui ne dérange rien. Simplement, l’ordre dont il s’agit pour elle est moins celui d’une société que celui d’une pensée et d’une âme. Et loin qu’elle veuille asservir les passions du cœur aux préjugés sociaux, elle se sert de ceux-ci pour remédier aux mouvements désordonnés qui l’effraient. (...). l’amour n’est que démence et confusion. (...). S’il ne s’y trouve qu’un seul sentiment, c’est qu’il a tout dévoré et s’il parle toujours sur le même ton un peu compassé, c’est qu’on ne lui permet pas les cris. Cette objectivité est une victoire.".

Conclusion

On a terminé notre parcours autour de la célèbre romancière Mme de La Fayette, ayant vécu au XVIIe siècle, très appréciée aussi bien à son époque que de nos jours. En effet, comme on a pu le voir dans ses trois œuvres les plus connues, La princesse de Montpensier, La princesse de Clèves et La comtesse de Tende, elle a su magistralement entrelacer des intrigues sentimentales et les a insérées dans de époques historiques précises. Comme de nombreuses femmes écrivains du XVII siècle, l’auteur chérit le thème de l’amour, fatal et impossible et qui conduit à la mort. Les irrésistibles passions que ses personnages éprouvent se révèlent impossibles car elles enfreignent les règles de la morale et de la société. Le bonheur, donc, est impossible à atteindre car selon Mme de La Fayette l’être humain est dominé par deux forces en opposition entre elles: la raison et le désir. C’est une vision pessimiste du monde qu’elle nous propose dans ses oeuvres, due à l’incompatibilité entre volonté et fatalité et surtout entre individus et société.
En conclusion, on vous présente les phrases finales des œuvres dont on vous a parlé, qui résument brièvement la conception de l’amour de Mme de La Fayette :
"Elle mourut en peu de jours, dans la fleur de son âge, une des plus belle princesses du monde, et qui aurait été sans doute la plus heureuse, si la vertu et la prudence eussent conduit toutes ses actions" 
La princesse de Montpensier

"Elle passait une partie de l’année dans cette maison religieuse et l’autre chez elle; mais dans une retraite et dans des occupations plus saintes que celles des couvents les plus austères; et sa vie, qui fut assez courte, laissa des exemples de vertus inimitables.
La princesse de Clèves

"Elle expira elle-même peu de jours après et reçut la mort avec une joie que personne n’a jamais ressentie; elle chargea son confesseur d’aller porter à son mari la nouvelle de sa mort, de lui demander pardon de sa part et de le supplier d’oublier sa mémoire, qui ne lui pouvait être qu’odieuse. Le comte de Tende reçut cette nouvelle sans inhumanité, et même avec quelques sentiments de pitié, mais néanmoins avec joie. Quoiqu’il fût fort, jeune, il ne voulut jamais se remarier, et il a vécu jusqu’à un âge fort avancé ”
La comtesse de Tende

 

Bibliographie :
-Mme de La Fayette Romans et Nouvelles ed. Classiques Garniere
-Bernard Pingaud Mme de La Fayette ed. Seuil
-AAVV XVIIe siècle coll. Itinéraires Littéraires ed. Hatier

 

 

 

Les extraits des œuvres de Madame de La Fayette.

La Princesse de Montpensier : "Les armées étant remises sur pied, tous les princes y retournèrent; et le prince de Montpensier trouva bon que sa femme s’en vînt à Paris, pour n’être plus si proche des lieux où faisait la guerre. Les huguenots assiégèrent la ville de Poitiers. Le duc de Guise s’y jeta pour la défendre et il y fit des actions qui suffiraient seules pour rendre glorieuse une autre vie que la sienne. Ensuite la bataille de Moncontour se donna. Le duc d’Anjou, après avoir pris Saint-Jean-d’Angély, tomba malade, et quitta en même temps l’armée, soit par la violence de son mal soit par l’envie qu’il avait de revenir goûter le repos et les douceurs de Paris, où la princesse de Montpensier n’était pas la moindre des raisons qui l’attirât. (…) Le duc d’Anjou ne changea pas à Paris les sentiments qu’il avait conçus pour elle à Champigny."

 

La Princesse de Clèves : "Mme de Clèves lut cette lettre et la relut plusieurs fois, sans savoir néanmoins ce qu’elle avait lu. Elle voyait seulement que M de Nemours ne l’aimait pas comme elle l’avait pensé et qu’il en aimait d’autres qu’il trompait comme elle. Quelle vue et quelle connaissance pour une personne de son humeur,qui avait une passion violente, qui venait d’en donner des marques à un homme qu’elle en jugeait indigne et à un autre qu’elle maltraitait pour l’amour de lui !Jamais affliction n’a été si piquante et si vive:il lui semblait que ce qui faisait l’aigreur de cette affliction était ce qui s’était passé dans cette journée et que, si M de Nemours n’eût point eu lieu de croire qu’elle l’aimait, elle ne se fût pas souciée qu’il en eût aimé une autre. Mais elle se trompait elle-même ;et ce mal, qu’elle trouvait si insupportable, était la jalousie avec toutes les horreurs dont elle peut être accompagnée. Elle voyait par cette lettre que M de Nemours avait une galanterie depuis longtemps. Elle trouvait que celle qui avait écrit la lettre avait de l’esprit et du mérite ;elle lui paraissait digne d’être aimée ;elle lui trouvait plus de courage qu’elle ne s’en trouvait à elle-même et elle enviait la force qu’elle avait eue de cacher ses sentiments à M de Nemours. Elle voyait, par la fin de la lettre, que cette personne se croyait aimée ;elle pensait que la discrétion que ce prince lui avait fait paraître, et dont elle avait été si touchée, n’était peut-être que l’effet de la passion qu’il avait pour cette autre personne à qui il craignait de déplaire. Enfin elle pensait tout ce qui pouvait augmenter son affliction et son désespoir. "

Comtesse de Tende : "Le chevalier de Navarre la vint voir, il prit des liaisons et des mesures avec elle; mais en la voyant, il prit aussi pour elle une passion violente. Il ne s’y abandonna pas d’abord; il résista; mais pour résister, il ne fallait pas voir souvent la comtesse de Tende et il la voyait tous les jours en cherchant la princesse de Neufchâtel; ainsi il devint éperdument amoureux de la comtesse. Il ne put lui cacher entièrement sa passion; elle s’en aperçut; son amour propre en fut flatté et elle se sentit un amour violent pour lui. "

Comtesse de Tende : "Elle passa quelque temps en cet état, paraissant plutôt une personne morte qu’une personne vivante. Enfin, vers le sixième mois de sa grossesse, son corps succomba, la fièvre continue lui prit et elle accoucha par la violence de son mal. Elle eut la consolation de voir son enfant en vie, d’être assurée qu’il ne pouvait vivre et qu’elle ne donnait pas un héritier illégitime à son mari. Elle expira elle-même peu de jours après et reçut la mort avec une joie que personne n’a jamais ressentie; elle chargea son confesseur d’aller porter à son mari la nouvelle de sa mort, de lui demander pardon de sa part et de le supplier d’oublier sa mémoire, qui ne lui pouvait être qu’odieuse. "

 

Fonte: http://utenti.multimania.it/IVae/dossier/fayette.doc

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